Le corps dans la main

Octobre 2011

 

4 octobre : dire que j'ai été sur les nerfs toute la journée serait trop faible.Je trépignais de m'ennuyer, d'être seule, excitée d' attendre.. Une journée purement inutile, comme tant d'autres à venir. J'écume.

Je me sens prisonnière de cette ville, et de l'espace global : toutes les villes sont pareilles, tous les espaces sont finis, le regard ne peut jamais embrasser la totalité de ce qui l'entoure, je ne peux me déplacer qu'à la vitesse de mes pas.Etre un être humain limité physiquement dans un monde limité géographiquement, limité dans sa diversité, c'est une échelle de réalité terrible. Car oui, l'universel est bien plus présent qu'on ne le croit, et rien ne sert de vouloir échapper à une condition parcequ'une à laquelle vous trouverez les mêmes griefs vous attends un peu plus loin. La diversité, c'est superficiel. Vos sentiments et ressentiments n'en ont rien à foutre de la diversité, ils sont formés et formatés à votre personnalité, et les environnements sont trop semblables pour ne pas les susciter.

Je ne crois plus en l'apprentissage, ma curiosité se force, s'accroche despespérement aux sujets qui la passionaient auparavant. Là encore, le leurre est magnifique : je poursuis une question idéale soufflée par une curiosité introspective,mais l'envie de recherches s'étiole,l'espoir retombe comme une bulle de chewing-gum fanée, et pourtant c'est ce qui me fait tenir, espérer, m'accrocher à un futur dont je n'ai pas envie. On se rapelle au doctorat?

 

 

 

9 octobre :  je me figure de plus en plus souvent à l'hôpital, dans le service psychiatrique, comme un genre de mouroir pour dépréciés sociaux. J'ai l'impression de vivre une descente à l'abîme, de me contempler glisser chaque jour, de découvrir de nouveaux symtômes, de nouveaux inconforts, de nouveaux toc, de nouvelles angoisses. Le leurre de ma vie est d'aborder l'asile du côté de la blouse, plutôt que du côté de la camisole. Ricanement et ironie suprême. J'en rage de n'être capable de rien.

Je voudrais être légère comme une plume, inhumaine, sans soucis, sans parents, sans amis, sans enjeux, à voleter au nez des passants. En attendant je fais comme si, je marche a toute allure dans les rues, plume farouche, monde autarcique de pensée, ces pensées qui vont plus vite que les mots, qui décrivent tout sur leur passage, qui vivent, se bousculent, débattent, chantent et frissonnent. Je ne serai jamais seule avec elles. Pourtant on ne peut l'être plus.

Je ne sais pas ou trouver refuge.

 


10 Octobre : J'espère et je suis désabusée a la fois, je ne sais pas quoi choisir entre l'espoir fou et la morbidité de l'évidence.Alors j'oscille. Sinusoïde anarchique entre mauvaise volonté, exubérance, extinction, faibles lueurs, résignation et refus. C'est infini. C'est le non équilibre comme condamnation. 

 

 

12 Octobre : je ne mange presque rien depuis 2 jours. Quelle liberté! la bouchée appelle la bouchée, mais si il n'y en a aucune, étrangement c'est plus facile. Tout me parait simple. Comme si la nourriture m'empêchait d'être vraiment moi, de m'exprimer. Là je n'ai pas a m'en soucier, alors je vis un peu.

Mais à 250 kcal par jour, j'ai des crampes d'estomac. Quelqu'un a un truc ????

  

 

16 Octobre : un, deux, trois, quatre et plus rien. Quatre verres, et la plus belle éthanolisation de ma vie. Il faut dire qu'avec le ventre vide depuis 3 jours, l'effet a été appréciable. Ce n'est pas la première fois que je m'en rends compte : je marche à la baffe. Là, en l'occurence, ça a été une baffe physique, comme je les aime, celles qui vous laissent à terre, celles qui vous rendent moite et amorphe 2 jours durant, mais aussi une baffe morale : l'être humain peut être bon avec ses semblables biturés. Il suffit de savoir choisir le coma duquel on vous assiste. L'expérience prouve que l'éthylique passe mieux que l'hypoglycémique. Ma foi, il y des vérités qu'on ne trouve pas dans les manuels. De ma léthargie hilare et convulsive, je percevais des bribes de phrases, je réalisais mon rêve d'Alice : j'entendais ce qu'on disais de moi. Je sentais des mains qui me portaient, qui disaient que j'étais légère, je me sentais soulevée dans les nuages. Si ma solution était un paradis artificiel?

 

 

 

24 Octobre : il est 22h, la soirée commence à peine. J'ai déjà expédié un manuel d'oscilloscope,regardé un film, fait une crise de boulimie, pris une douche, planifié ma journée de demain, pris une vingtaine de résolutions, autant de cigarettes, et écrit sur mon blog. Je fais quoi maintenant??

 



04/10/2011
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