Sisyphe à l'école
C'est la rentrée, je n'ai plus d'excuse pour ne pas concrétiser les choses.
Je me demande si me mettre des échéances et des coups de pied au cul me fait avancer ou me donne plutôt envie de ruer dans le tas.
La ruade c'est les crises, la déprime, le mutisme pendant des jours. Avancer, c'est...il y a longtemps que je ne sais plus trop ce que c'est.
Ce sera donc un nouveau départ, le 25ème du nom, au moins.
C'est la rentrée, ma mère revient dans le paysage.
Clitemnestre sans personnalité, Clitemnestre fatiguée, Clitemnestre qui me dégoute. C'est rude à dire. C'est ignoblement vrai.
C'est la rentrée, ce sont les mannequins étudiantes tout droit sorties des magazines à chaque station de métro.
Le choc de la confrontation des images. Je me prépare aux coups.
C'est la rentrée, la liberté, celle de s'envoler, de passer des nuits d'insomnies, de vivre au rythme des semaines, des jours, d'errer;
c'est étouffer les questions le temps de la découverte, c'est voguer sur un calendrier, c'est une chaîne douce aux bouquins et aux bibliothèques,
c'est une fatigue qui vous ferme les paupières douloureuses.
C'est la rentrée, la solitude, attendue comme le Messie. Dans ses promesses il y a le non-regard, l'abandon, le soleil de fin d'après midi avec ses
cigarettes, les calories à faire dégringoler au plus bas.
C'est la rentrée, ce sont les autres, les amphis, les pauses dejeuner qui virent à l'angoisse. Ce sont ces gens, que je regarde, qui ne me regardent pas,
que je fuis, qui ne s'en aperçoivent pas. Pour qui tout est normal. Ces gens aveugles.
C'est la rentrée, les premiers brouillards qui tombent, le réveil bien de trop tôt, le café silencieux, la capuche protectrice sous la pluie encore tempérée.
Les frimas qui reviennent, avec leur cohorte de grisaille, de feuilles qui dorent les trottoirs et de soleils ras. Les pommes sur les arbres, le chant du cygne
des jardins et des parcs. C'est la complicité avec l'air tiède humide. Les gens se rentrent, je sors.