Le corps dans la main

Exode des sens

 

 

 

Un jardin qui grésille, l'ombre d'une balustrade qui se découpe. Sous la main, le métal froid et lisse. Et la vie qui distille, goutte à goutte, du front aux chevilles, comme une incontinence douce. Les ombres familières, le sentiment d'avoir enfin saisi une idée insaisissable. A bras le corps, la  refermer sur le vide que l'on surplomble, la sentir palpiter, indicible, dans chaque goutte qui s'écoule le long de ses membres. La résilience est un sentiment physique, éphémère. Celui du doute résolu. Celui qui, évanescent, naît de ces veilleuses, de ces coupes, de ces images, de ces chimères. Celui qui, moqueur, s'élance dans l'air vide bruni de chaleur. Celui du plein. Celui de l'inatteignable et du possible. Un arc de frênes immobiles lui dessine un écrin duquel il s'évanouit bientôt, tandisque la fumée que l'air exhale se perd dans une volute lascive. Elle est là, l'idée. Ronde et pleine. A cache-cache avec l'âme, conciliante, facétieuse. Une idée ne saurait être tolérée humaine, compromise, interminée. C'est une impulsion des chairs, une vivacité d'absolu qui ne peut être contredite, quoi que l'on questionne. Et qu'importe si, comme les autres, elle mourra bien vite dans une fadeur incandescente, comme la cendre de cette cigarette morte-née. Sa gestation charnelle, son façonnage, angle par angle, son pétrissage, sa mise au monde limpide, limpide, évidente et imparfaite, irrégulière de lumière, jaillissant d'un tréfond moite et obscur, font de son étrangeté une expérience mystique, lui confèrent la splendeur de l'éphémère et du fragile. Idée et sensation sont synonymes. Et sous ce ciel voilé où les lumières diffusent en un labeur difficile, où leurs noms se reflètent sur les contours aigus et noirs, un sourire me transperce. Cette idée je ne saurais la définir. Elle est là, sous mes doigts, entre le métal froid et la pulpe de mes mains. Minuscule et lointaine, enrobant un esprit vidé de son souffle, hagard, révélé. Peut être un jour parviendrais-je à y poser des mots. Peut être serait-ce dommage. 



01/07/2012
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