Le corps dans la main

Le radeau ivre

 

 

 

Je vois la vie à travers des écoutilles. Tout est globuleux, hermétique. Je n'arrive cependant pas à savoir si je suis dehors ou dedans, si la vitre à laquelle je me heurte est la mienne ou celle de l'autre. Ce silence fat de grosse bulle me donne la chair de poule. Envie de hurler, de griffer ces visages pour me rendre compte que ce ne sont que des chimères. Mon cerveau est pétrifié, mon ego jubile. Je me séquestre jalousement pour mieux me voir imploser. Parceque je n'ose pas pourrir la vie de l'autre, je pourris la mienne par l'excès, puis je la laisse tranquillement se putréfier par le néant. J'implose, je suis inerte, soufflée, encéphaliquement morte, je me regonfle, regonfle, je m'euphorise , et puis j'implose à nouveau. Crescendo decrescendo. 

Et pas une main ne vient briser cette putain de vitre. Désabusés, soupirants, incertains, flegmatiques, raisonnables. On essaye gentiment de parler, de sourire, de convaincre.  Personne pour m'attraper par le col, m'arracher de ma cage et me dire "maintenant tu viens vivre dans notre monde". 

Dans le mien le temps ne s'écoule pas de la même manière, dans le mien on combat les journées les unes après les autres, on éprouve le temps au présent. Dans le mien je flotte, je m'oublie, je ris des obligations, je suis en parallèle, et je retombe honteusement dans mes pas lorsque je sens un regard trop réel. Dans le mien tout est propre, tout est familier, tout est à mon échelle. Dans le mien il n'y a de place pour personne. 

Et pourtant j'y crève lentement de froid. D'engelures. 


Je ne veux ni de ce monde ni de celui qu'on a à m'offrir. Je suis lasse comme si j'avais une douzaine de marmots derrière moi. Je n'ai pas besoin de voir pour être blême. Je n'aurais de toute façon jamais d'autre regard que le mien à poser sur ce monde de succédanés tant vantés. Le film est prêt, il est là, il reste à enclencher la bobine. Mais les images sont sans suspens, on pressent les décors, on pressent la fin. 

La vie m'agace. La mort me gêne.

Ce corps qui déjà habité par la vie me semble peu reluisant, une fois livré à la décrépitude...comme dans un mauvais policier : "le corps bordel, qu'est ce qu'on va faire du corps ? "

 



14/01/2012
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