Le corps dans la main

Noyade

 

 

 

 

Mes membres s'agitent lourdement, freinés, englués. Au dessus de ma tête, je vois la lumière de la surface qui transperce les couches d'eau, si proche et innacessible. Je suis en train de me noyer.

Je n'entends plus les bruits du dehors, les sons et les images me parviennent bouillés, sourds. Seul le battement de mon coeur et ma petite voix sont distincts. Je m'épuise. J'ai 1000ans depuis 3 ans. Pourquoi ne puis-je atteindre la surface? Peut être parceque je me suis lestée avant de plonger, parceque j'aime cette sensation antalgique d'entre deux mondes. Je me noye, mais pour rien au monde je n'aurais souhaité rester sur la rive. Mon autosatisfaction est léthale. Je me trouve dans une brèche entre la jeune fille normale moyenne et l'opiomane borderline. Sauter le fossé est impossible. La peur de me rater me fait rester dans ma petite bulle dilettante et souffreteuse. Apparemment pour les autres, la question ne s'est pas posée : ils ont sauté, ils ont choisi, une terre ou l'autre. Moi je ne sais pas. Je suis une pauvre comédienne rattrapée par son rôle. Mon public se lasse, crie au Vaudeville, au déjà vu, à la lourdeur du texte. Mais je ne peux pas arrêter ma tirade. 

Je n'ai pas d'air, j'ai sommeil, j'ai faim. Pourquoi ne suis-je pas encore morte? 

Sous l'eau trop claire qui me sépare du vrai, je rêve. Je rêve de vivre dans l'aseptique, le diurne à vie. Le rayon boréal, la nuit qui ne tombe jamais, ou qui éclipse le jour. L'intemporel, en ermite, sans dégoût ni haine. Sans banalités ni concessions. Ce n'est pas par sagesse, juste par manque de courage.



29/08/2011
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