Le corps dans la main

Septembre 2011

 

1er Septembre : ça y est.. Je suis vidée, explosée de noirceur et de solitude... mais j'ai enfin réussi. "Alors ce weekend?" si ils savaient.. J'ai les sinus en choux fleur maintenant, de grands yeux de vache humide..le spectacle est d'un pathétique mauvais. Mais j'ai dormi comme un bébé, faisant fi de toutes les putains d'insomnies qui font partie de mes nuits comme des meubles. Mieux que toutes les tisanes et que tous les somnifères, essayez la crise de BV. 

 

 

2 septembre : -1 kg en 2 jours. Youpie. Je crois enfin rentrer dans l'échiquier des grandes. Pauvre cloche. Comment? ah oui, j'ai un repas de fête qui s'annonce. Je vais me venger. De quoi, de qui, je ne sais pas. De mes privations, de mes attentes. Je vais me tuer dans l'oeuf pour mieux recommencer et mieux me lamenter. Pourquoi chaque amorce de perte de poids est elle avortée de la sorte? Une descente linéaire, douce, glissante, sûre, vers le trou glacé tant rêvé. Je n'ai aune combativité, je ferai partie des traitres, ceux qui vendent tout pour sauver leur petite peau minable et leur petit confort. Poutrquoi sauver cette peau que je hais? peut être que je ne la déteste pas tant que ça finalement. A moins que ce soit le confort que je veuille sauver de la bataille. ça doit être ça. C'est encore moins glorieux. Je ne sais plus comment trouver la bonne amorce pour ne pas déchirer mes promesses. 

 

 

14 septembre : je ne sais pas si je suis en train de mourir d'espoir ou de désespoir. C'est parti. Mais en ais-je vraiment envie? dilemne, oh torture! je ne peux pas rester comme ça, à raser les murs et me courvir de rage honteuse. Mais je pourrais juste être raisonnable. Parcequ'au final, l'anorexie est d'une banalité affligeante, et coupe tous les autres embryons de possibles. Ouais, je vais dire bye bye à tout ça...quand j'aurai mes 10kg de moins. Alors je serai parée pour affronter le monde réel, me dis-je. Là j'arrête le petit jeu. Mais je ne peux pas rester comme ça. Je programme mes adieux, j'adore ça, le petit côté martyr déchirant..mais pas avant d'avoir perdu ces foutues cuisses. Cohérence, incohérence....

 

 

 

17 septembre : après tout,pourquoi ne pas finir par être une fille normale? pourquoi ne pas essayer de manger sans compter les calories, de manger des féculents comme tout le monde, d'aller à une soirée et surmonter ma peur le temps de dire OUI. Vivre pour autre chose que la nourriture, pour cette année d'études qui commence, pour les projets qui se montent, pour les amitiés qu'il est vital de se faire. Si seulement je pouvais être amoureuse, rien qu'un peu. Si seulement j'arrivais à faire simple. Si seulement je pouvais mettre mon anorexie dans un album photo pardonné. Si seulement. Je commence à y croire. Pas que c'est pour demain, mais au moins que c'est possible. Je m'accroche à la pleine Lune, elle glisse. Artificielle petite malade.


 

21 septembre : voilà, la parenthèse est censée être finie, je revois les mêmes gens, d'autres, je suis enfin tirée ailleurs. Mais il subsiste, par à coups qui révèlent le fond caché par un quotidien exigeant, des idées. L'idée que la maigreur c'est la vraie consistance. L'idée que je suis incorrigiblement dans un masque ridicule de rires, de soubresauts, de silences. De quel droit devrais.je leur montrer la vérité? ils ne la demandent pas. Toujours cette foutue attente, ce foutu espoir en l'autre. Et le sentiment de ne jamais arriver à maigrir, parceque oui, je sais me restreindre, mais je sais être boulimique dans la même journée. Alors je tente l'alimentation normale-modérée, et je met de côté mes ideaux osseux. Non sans douleur. 

Je suis pour l'instant un fantôme affairé. Mais je sens qu'il en faudrait peu pour réveiller la mélancolie dormante et les pleurs étouffés. Heureusement quelques espoirs s'ouvrent en ce début d'année : des cours sympathiques, un journal à m'occuper, une confidente avec qui j'ai rompu le pacte de garder le silence sur mes tca.

Je vais m'étourdir. Tourner, tourner, tourner, vite, dans mes cotillons, à m'en faire retourner le coeur.

Mettre des gants pour cacher ma sensibilité à fleur de peau. 

 

 

 

26 septembre : Je suis plus grosse que je n'ai jamais été. C'est un gouffre.

Pourtant je me suis fait siffler aujourd'hui. Une voix du haut d'un immeuble qui vous crie comme une sentence divine "hé!tu es belle!". C'était miraculeux et même si c'était sans nul doute un connard, même si j'ai souris, ça m'a fait rosir les tripes. Paradoxe immense, je suis plus que jamais un thon mais j'accumule les marques d'intêret. Peut être qu'ils se moquent tous, peut être qu'ils voyent ce qu'ils veulent voir. Peut être que je suis la risée des passants et des habitués,avec la honte qui s'affiche dans mes manières gauches, ma fausseté,mes cuisses qui enflent chaque mois, témoins de mon incurable boulimie. Tout cela n'arrange pas mes questionnements ni ma vision de moi-même.

Autre truc qui se multiplie ces temps : le nombre de séries sur la boulimie,l'internement, les troubles psychiatriques, etc.. que je rencontre inopinément. Parceque c'est différent de choisir de lire un article et de vous trouver balancée dans un film qui vous reprojette dans votre propre folie,vos propres impasses et vos lits d'hôpital.Je ne veux pas être ni grosse, ni souffreteuse, ni haïe, ni méprisée, ni commune, ni rejetée, ni lunatique, ni fardée, ni obséquieuse, ni rigide, ni, ni,ni. Les champs de possibles en sont restreints. Je suis une maison vide, je cherche mes meubles, mais je sais trop bien ceux que je ne veux pas. J'ai la personnalité difficile. J'aime pas.

 

 




01/09/2011
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